Esquisse du plafond du Théâtre neuf de Compiègne. Apollon, la Tragédie, le Drame moderne,…
Jules Élie Delaunay (Nantes, 1828 – Paris, 1891)
Esquisse du plafond du Théâtre neuf de Compiègne. Apollon, la Tragédie, le Drame moderne, la Comédie. 1869
Jules Élie Delaunay (Nantes, 1828 – Paris, 1891)
xixe siècle
Huile sur toile
H. 0,64 ; L. 0,64 m
C.91.001
Atelier de l’artiste. Vente Élie Delaunay, Paris, hôtel Drouot, 14-16 décembre 1891, no 63. Coll. part. Acquis en 1991 dans le commerce d’art parisien. Entré au château de Compiègne le 21 mai 1992. Comité du 14 mars 1991. Arrêté du 2 avril 1991.
En 1866, Napoléon III décida de construire à Compiègne un nouveau théâtre de cour, plus grand que celui édifié en 1832 à l’occasion du mariage de Louise d’Orléans, fille de Louis-Philippe, et de Léopold Ier de Belgique. Auguste Gabriel Ancelet, architecte du palais, fut chargé du projet. En juin 1869, il pressentit Jules Élie Delaunay pour la peinture de la coupole de la salle de spectacles et Tony Faivre pour les onze plafonds en soffites11. Sur le contexte de la commande et son début d’exécution, voir Mireille Mégroz-Cochand, Jules Élie Delaunay (Nantes, 1828 – Paris, 1891), les grandes peintures décoratives, mémoire dactylographié pour l’obtention du diplôme d’études supérieures de l’École du Louvre, 1972, 3 vol. (textes, inventaire général et pièces d’archives) ; Patrick Dupont, « Plafond du théâtre de Cour du château de Compiègne », dans Jules Élie Delaunay, 1828-1891 [cat. exp. Nantes, musée des Beaux-Arts, 27 septembre – 20 novembre 1988, Paris ; musée Hébert, 14 janvier – 19 mars 1989], Nantes, musée des Beaux-Arts / Paris, Réunion des musées nationaux / Saint-Sébastien, ACL éditions, 1988, p. 123-124.. Delaunay, artiste de renom, venait alors de remporter un grand succès au Salon avec La Peste à Rome (Paris, musée d’Orsay).
La définition du programme iconographique de la coupole, l’histoire du théâtre depuis son origine, revint à Ancelet. Ce fut aussi vraisemblablement lui qui invita Delaunay à s’inspirer de la composition conçue par Jules Lenepveu (1819-1898) pour le nouvel opéra, alors en cours de construction sous la direction de Charles Garnier. Les différentes époques de l’art théâtral devaient être évoquées par plusieurs groupes mêlant allégories et personnages célèbres. En octobre 1869, Hector Lefuel, architecte de la Maison de l’Empereur, présenta une esquisse peinte de l’ensemble pour approbation à Napoléon III. Lefuel fit remarquer au souverain que ce programme lui semblait « bien ambitieux et peu en rapport avec la donnée d’un théâtre de la cour ». Le souverain répondit « que le sujet lui était fort indifférent, qu’on regardait peu un plafond de salle de spectacle parce qu’avec beaucoup de bonne volonté on ne le voyait jamais qu’imparfaitement et qu’il ne s’opposait pas à ce qu’on exécutât celui du théâtre de Compiègne d’après l’esquisse qu’il avait sous les yeux22. F21 2298/ 2, lettre d’Hector Lefuel, architecte de la Maison de l’Empereur, au ministre de la Maison de l’Empereur et des Beaux-Arts, 27 octobre 1869, éditée par Mireille Mégroz-Cochand dans Jules Élie Delaunay (Nantes, 1828 – Paris, 1891), les grandes peintures décoratives, mémoire dactylographié pour l’obtention du diplôme d’études supérieures de l’École du Louvre, 1972, 3 vol. (textes, inventaire général et pièces d’archives). ». Il demanda également que la peinture fût exécutée à la détrempe sur toile, puis marouflée, choix qui lui fut soufflé par Lefuel et auquel Ancelet était opposé. Une note conservée dans les archives du ministère des Travaux publics décrit la composition telle qu’elle fut approuvée par l’empereur : « Apollon, comme Génie de la musique et de la Poésie, s’apprête à monter Pégase, conduit par l’Harmonie./ La Mélodie lui présente sa lyre et Éros le couronne./ La Tragédie s’appuyant sur le masque tragique, et de l’autre main tenant un glaive./ Prométhée, symbole de la Tragédie antique, la fatalité ; des enfants traînent une banderole avec les noms d’Eschyle, Sophocle, etc./ Le Drame moderne, la Muse de Shakespeare, un cadavre à ses pieds, à ses côtés Hamlet./ La Comédie. La Muse de la Comédie traîne à ses pieds par les cheveux un satyre symbole des imperfections et des ridicules ; un enfant le frappe du bâton recourbé ; la Vérité lui donne un miroir et de l’autre main couronne le nom de Molière./ La Danse. La Danse guerrière, la Bacchanale, la Pastorale, etc.33. F21 2298/11, note émanant du ministère des Travaux publics, 12 novembre 1891, éditée par Mireille Mégroz-Cochand dans Jules Élie Delaunay (Nantes, 1828 – Paris, 1891), les grandes peintures décoratives, mémoire dactylographié pour l’obtention du diplôme d’études supérieures de l’École du Louvre, 1972, 3 vol. (textes, inventaire général et pièces d’archives). Cette note a été rédigée à partir des dossiers d’archives en réponse à une demande de renseignements de Georges Lafenestre qui préparait alors un texte monographique sur Delaunay. ».
La commande fut passée à Delaunay le 6 novembre 1869 pour la somme de 25 000 francs. Le souverain désirait que les travaux fussent terminés dans les plus brefs délais, mais la composition n’était pas encore mise en place lorsqu’intervint la chute de l’empire en septembre 1870. D’après les ouvrages publiés sur le château de Compiègne au début de la Troisième République, Delaunay en avait toutefois achevé une partie. Les recherches d’archives effectuées par M. Mégroz-Cochand et celles lancées par les conservateurs du château de Compiègne dans les années 1970 ont suggéré plusieurs pistes : des fragments de la composition seraient restés roulés au palais, ou peut-être au Louvre, et auraient disparu, peut-être au moment de la guerre de 1914. En revanche, les soffites peints par Tony Faivre demeurèrent au palais et s’y trouvent encore (voir les œuvres en rapport). Resté longtemps inachevé, le Théâtre neuf n’a été terminé qu’au début des années 1990. Il est aujourd’hui en activité sous le nom de Théâtre impérial.
Le projet de décor de Delaunay n’a longtemps été connu que par des dessins préparatoires (au demeurant nombreux) conservés au musée d’Arts de Nantes, jusqu’à l’entrée successive de deux esquisses peintes dans les collections du château de Compiègne. La seconde (voir C.2013.006), qui correspond très exactement au descriptif iconographique conservé, est très certainement celle qui fut soumise à Napoléon III. Celle-ci, d’une facture moins poussée, présente un état antérieur du projet : le principe de la composition et la gamme chromatique sont déjà établis, certaines figures comme celle d’Apollon ont trouvé pour l’essentiel leur attitude, mais les groupes sont moins développés, ce qui permet d’apprécier le travail effectué par Jules Élie Delaunay pour enrichir ce décor tout en lui donnant davantage de rythme et d’unité.
Auteur du commentaire : Laure Chabanne
Genre :
Peinture d’histoire → Peinture allégoriquePeinture d’histoire → Peinture mythologiqueEsquisses
Index iconographique :
Apollon ; couronne ; Eros ; glaive ; lyre ; masque ; miroir ; muse ; Prométhée ; satyre
Cette œuvre appartient à l’ensemble :
Les collections et commandes impériales
Étapes de publication :
2020-06-15, publication initiale de la notice rédigée par Laure Chabanne
Pour citer cet article :
Laure Chabanne, Esquisse du plafond du Théâtre neuf de Compiègne. Apollon, la Tragédie, le Drame moderne, la Comédie. 1869, dans Catalogue des peintures du château de Compiègne, mis en ligne le 2020-06-15
https://www.compiegne-peintures.fr/notice/notice.php?id=418