Jacques Kuhnmunch, Laure Chabanne & Étienne Guibert
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Musées du Second Empire Franz Xaver Winterhalter (1805 – 1873)

Franz Xaver Winterhalter (1805 – 1873)

Laure Chabanne

Né dans un petit village isolé de la Forêt-Noire, au sein d’une famille pauvre, Franz Xaver Winterhalter (Menzenschwand, 1805 – Francfort, 1873) mena une carrière exceptionnelle et devint le portraitiste favori des têtes couronnées européennes entre 1840 et 1870.

Dès ses débuts en Allemagne, il s’adonna particulièrement au genre du portrait, pratique lucrative et très en vogue. À Munich, il fut l’élève de Joseph Karl Stieler, disciple de François Gérard, grand portraitiste français, et auteur d’une célèbre galerie de beautés pour le roi Louis Ier de Bavière. En 1834, à son retour d’un voyage d’études en Italie, Winterhalter fut nommé peintre officiel de la cour de Bade. Il vint cependant s’installer à Paris et commença par attirer l’attention au Salon en exposant des toiles de genre. En 1837, Le Décaméron (collections princières du Liechtenstein) lui valut un succès extraordinaire auprès du public. Winterhalter sut alors faire valoir ses talents de portraitiste et devint le peintre officiel de la famille d’Orléans. Outre plusieurs portraits du roi Louis-Philippe, il exécuta ceux de son épouse, la reine Marie-Amélie, de sa sœur, madame Adélaïde, ainsi que de ses enfants et de leurs conjoints. Ces portraits en pied, tous de format identique, forment une véritable galerie dynastique, aujourd’hui présentée au musée national du château de Versailles. Le château de Compiègne en conserve des copies commandées par le roi et exécutées par l’atelier de l’artiste.

Dès 1838, Louise d’Orléans, fille aînée de Louis-Philippe et épouse de Léopold Ier, roi des Belges, introduisit également Winterhalter à la cour de Bruxelles. Elle fit connaître son talent à la reine Victoria, nièce de Léopold, qui appela le peintre à Londres. De 1842 aux années 1860, Winterhalter passa chaque année plusieurs semaines en Angleterre et exécuta plus d’une centaine de tableaux pour la famille royale britannique.

En 1848, après la chute de la monarchie de Juillet, Paris resta son port d’attache. Lorsque Louis-Napoléon Bonaparte rétablit l’empire en décembre 1852 et épousa la comtesse de Teba, c’est à Winterhalter qu’il fit appel pour forger les effigies officielles de la nouvelle dynastie. Comme d’autres artistes liés à la famille d’Orléans, le peintre n’hésita pas à mettre ses pinceaux au service du nouveau souverain. En 1853, il composa les portraits d’apparat de l’empereur et de l’impératrice. Les originaux ont disparu en 1871 dans l’incendie des Tuileries, mais il en reste de très nombreuses copies qui peuplaient les ministères et les ambassades. Les collections compiégnoises en comptent plusieurs, de format et de qualité variables. Auteur d’un second portrait de Napoléon III en civil, Winterhalter s’imposa surtout comme le peintre favori de l’impératrice Eugénie. Exposés au Salon et largement reproduits par l’estampe et la photographie, les portraits qu’elle lui commanda contribuèrent largement à façonner son image publique. L’Impératrice Eugénie entourée des dames de sa cour est assurément l’œuvre la plus étroitement associée, aujourd’hui encore, au souvenir du règne de Napoléon III.

Sous le Second Empire, la haute société cosmopolite qui vivait ou séjournait à Paris se pressa plus que jamais chez Winterhalter. Les grandes dames se rendaient dans la capitale internationale de l’élégance pour lui commander leur portrait comme elles allaient acheter les dernières toilettes à la mode chez Charles Frederick Worth, l’inventeur de la haute couture. Il fallait s’inscrire sur une liste d’attente pour poser devant lui. En 1865, il fut appelé à la cour de Vienne. Il y exécuta le célèbre portrait de l’impératrice Elisabeth d’Autriche où celle-ci porte des étoiles d’argent piquées dans ses cheveux. À la fin des années 1860, des artistes plus jeunes comme Alexandre Cabanel ou Carolus-Duran commençaient toutefois à lui faire une sérieuse concurrence à Paris. La guerre franco-prussienne sonna le glas de sa carrière. Elle le força en 1870 à revenir s’installer en Allemagne, où il mourut trois ans plus tard d’une fièvre typhoïde.

Bien que le portrait d’apparat fût un genre très codifié, Winterhalter sut varier et renouveler ses compositions tout en s’adaptant aux goûts de ses commanditaires. Ses portraits reflètent l’image que les élites européennes souhaitaient donner d’elles-mêmes, à mi-chemin entre tradition et modernité, et mêlent des références à Van Dyck, à Rubens ou à Titien avec l’expression des modes et de la sensibilité de son temps.

Œuvres de l’ensemble