Jacques Kuhnmunch, Laure Chabanne & Étienne Guibert
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Musées du Second Empire Portraits du Second Empire

Portraits du Second Empire

Laure Chabanne

Ainsi que le montre l’historique des collections des musées du Second Empire, les portraits peints ont joué un rôle central dans la création du musée du Second Empire. Reflet d’une époque, ils apportent à ses présentations permanentes un supplément d’âme et de vie.

À partir du début du xixe siècle, l’art du portrait connut une vogue sans précédent et envahit les cimaises du Salon. Sous le Second Empire, alors que se développait le portrait-carte de visite photographique, le succès de ce genre en peinture ne se démentit pas. Faire peindre son portrait, tout particulièrement par un portraitiste reconnu comme Franz Xaver Winterhalter, Édouard Dubufe ou Alexandre Cabanel, était signe de réussite sociale.

Les collections compiégnoises offrent un ensemble unique en son genre de portraits de la famille impériale, dont une grande partie par ou d’après Franz Xaver Winterhalter. L’Impératrice Eugénie entourée des dames de sa cour en est le fleuron. Dans cette scène vigoureusement brossée par l’artiste badois, la grande tradition du portrait de cour est réinterprétée d’une manière moderne dans l’arrangement, les attitudes et le faste des toilettes, mélange révélateur de la nature du régime impérial. Les collections comprennent des effigies très codifiées, tels les portraits équestres de l’empereur, et des figurations plus intimes, comme le portrait à l’anglaise de Napoléon III en costume civil peint par l’atelier de Winterhalter (L’Empereur Napoléon III). Le croisement de ces tableaux avec le riche fonds de photographies de la famille impériale conservé au château illustre en outre l’usage grandissant que firent les artistes de ce nouvel outil, tout particulièrement dans le domaine du portrait. Peinture et photographie s’influencèrent réciproquement, se mariant même pour donner naissance à la photo-peinture.

Le statut social et l’importance historique des autres personnages représentés dans les collections sont très variés. Ces portraits, même lorsqu’ils figurent des inconnus, constituent un témoignage essentiel sur l’époque. Au-delà des conventions traditionnelles du genre, ils offrent un aperçu des normes sociales (attitudes et expressions, postures) et des goûts, tant dans la mode vestimentaire que dans le décor intérieur. Ainsi Madame Paul Meurice, portrait peint avec une précision ingresque par Félix Bracquemond, nous dévoile-t-il le mobilier capitonné, la robe à volants et les bijoux éclectiques d’une femme d’âge mûr ayant vécu dans le milieu romantique parisien sous la monarchie de Juillet.

Sous le Second Empire, un certain naturel empreint de dignité est généralement recherché dans les portraits. Cependant, la pose peut être mondaine ou sans apprêt, et la mise en scène diffère selon que le modèle est masculin ou féminin. Destinés à trôner dans les espaces de réception d’un hôtel particulier, les portraits féminins les plus ambitieux  montrent généralement la commanditaire dans une robe de bal à la dernière mode. La baronne Hallez-Claparède, une femme du monde issue de la noblesse d’Empire, étale avec assurance le luxe de sa toilette (La Baronne Hallez-Claparède par Édouard Dubufe). Fanny Péreire, épouse du grand banquier Isaac Péreire, adopte une attitude plus réservée (Madame Isaac Péreire par Cabanel). Quant à madame Ducos et à madame Richard, femmes de ministre, elles n’affichent pas la distinction étudiée des dames du grand monde, mais leurs portraits de grand format, confiés à des artistes en vogue, affirment de manière éclatante la réussite sociale de leur époux (Madame Ducos par Winterhalter; Madame Maurice Richard, par Carolus-Duran). Les messieurs sont le plus souvent campés sur un fond sombre, en tenue de ville, tel le comte d’Arjuzon, chambellan de l’empereur (Le Comte d’Arjuzon, par Flandrin). Loin des mises en scène décoratives des figures féminines, ce dispositif permet de concentrer le regard sur le visage et les mains, et donne de la force au modèle. Ainsi Louis-Gaston de Ségur, fils de la célèbre comtesse, semble-t-il surgir devant nos yeux (Monseigneur de Ségur, par Gaillard). Quelques autoportraits d’artistes ou portraits de leurs proches offrent une impression plus spontanée. Les tableaux exécutés par Thomas Couture et représentant sa femme et sa fille se caractérisent par une grande simplicité (Marie-Héloïse Servent (future madame Couture) ; Jeune fille endormie, dite Berthe Couture (1860-1932)). Le regard d’Isidore Pils sur son père vieillissant dénote une réelle tendresse (François Pils, père de l’artiste), tandis qu’Eugène Giraud a saisi son ami le peintre et émailleur Claudius Popelin dans la pose élégante et décontractée qui sied à un artiste (Claudius Popelin).

Œuvres de l’ensemble