Jacques Kuhnmunch, Laure Chabanne & Étienne Guibert
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Percement d’une route
Paul Alexandre Protais (Paris, 1826-1890)

Inscription

S.D.b.d. : Alex. Protais. 69

Historique

Choisi par l’empereur Napoléon III au Salon de 1869 et acquis sur la Liste civile par arrêté du 26 juin 1869 pour 5 000 Francs (DP 681). Mis en dépôt dans les appartements du maréchal Vaillant, ministre de la Maison de l’Empereur et des Beaux-Arts. Restitué à l’impératrice Eugénie en vertu d’un jugement rendu en 1879 ; envoyé à Camden Place en mai 1879. Duc et duchesse de Cambacérès. Christopher Forbes. Sa vente, Fontainebleau, étude Osenat, 6 mars 2016, lot no 295. Conseil artistique (délégation permanente) du 3 mars 2016. Commission d’acquisition des musées-châteaux (délégation permanente) du 4 mars 2016. Arrêté du 7 juillet 2016. Acquis grâce au mécénat de la Société des Amis du château de Compiègne.

Commentaire

Ce tableau appartient au registre de la scène de genre militaire, fort à la mode au XIXe siècle et particulièrement sous le Second Empire. Alexandre Protais faisait partie des peintres de batailles les plus appréciés et les plus populaires de son temps. Il avait suivi l’armée en Crimée et en Italie, n’hésitant pas à se mêler bravement aux troupes sur le front. Ces expériences lui inspirèrent de nombreuses toiles relatant non seulement les combats, mais aussi la vie du soldat. Parmi ses œuvres les plus célèbres figuraient deux tableaux exposés en pendant au Salon de 1863, Le Matin avant l’attaque et Le Soir après le combat (Chantilly, musée Condé). Il poursuivit sa carrière après la chute du Second Empire, illustrant notamment les souffrances de la guerre de 1870.
Dans cette composition présentée au Salon de 186911. Comme l’a signalé C. Granger, Percement d’une route a été photographié dans le cadre du Salon de 1869 (F21 7640, album Michelez du Salon de 1869, fol. 16)., l’artiste évoque les grands travaux auxquels contribua l’armée française en temps de paix. Des dizaines de soldats s’affairent à élargir une trouée forestière pour frayer une route. Ils abattent des arbres, débitent les troncs et transforment les branches en petits fagots, des charrettes débardant le bois au fur et à mesure. Un peu plus loin, certains commencent à creuser le sol. Au premier plan, un groupe d’officiers encadre la manœuvre. Protais s’est représenté près d’eux, en uniforme de capitaine. Assis sur un tronc d’arbre, il observe la scène. Le coloris et la facture de la toile rappellent que la peinture militaire fut l’un des terrains où les artistes s’attachèrent à représenter de manière plus directe et plus vraie l’homme en action en plein air. Le rouge des uniformes et le blanc éclatant des chemises des soldats égrènent leurs notes pimpantes sur le vert cru de la clairière. Quant à la mise en page, elle évoque les apports de la photographie et le renouvellement contemporain de l’école française de paysage, qui conduisit à la naissance de l’impressionnisme. La perspective baignée de lumière et le point de vue légèrement décentré invitent l’œil à entrer dans la toile pour suivre le tracé de la future route. Sur la droite, le tronc oblique d’un arbre en passe d’être coupé souligne la verticalité de la composition et l’effet de profondeur. La nature n’est pas bucolique et chargée de mystère, comme dans les toiles de l’école de Barbizon. Elle est un territoire modelé par l’action humaine. En cela, le sujet choisi par Protais comporte une dimension éminemment moderne.
Protégé par la princesse Mathilde, cousine de Napoléon III, Alexandre Protais était également très apprécié du couple impérial lui-même. Plusieurs des tableaux qu’il envoya au Salon furent acquis par la Liste civile et envoyés au musée de Versailles (Mort du colonel Brancion à la prise du Mamelon vert, Attaque et prise du Mamelon vert, 7 juin 1855). L’impératrice Eugénie avait notamment placé Passage de la Sésia, campagne d’Italie dans son hôtel particulier. Ce tableau lui fut restitué après 1870, de même que Soldat blessé. Quant au Percement d’une route, il lui fut rendu dès mai 1879. Un cartouche figurant sur le cadre de cette œuvre lors de son acquisition indiquait : « Donné par S.M. l’Impératrice au Duc et à la Duchesse de Cambacérès. Souvenir du Prince impérial, seul tableau lui ayant appartenu. » Si l’impératrice Eugénie le destinait peut-être à son fils, friand de sujets militaires depuis sa plus tendre enfance, celui-ci ne put en prendre possession puisqu’il partit le 29 février 1879 pour l’Afrique du Sud, où il trouva la mort face aux Zoulous le 1er juin. Après ce grand deuil, l’impératrice commanda trois tableaux à Protais : Une reconnaissance, Zoulouland, Le Prince impérial met la main à l’épée (vente Fontainebleau, étude Osenat, 7 avril 2019, lot no 588, repr.), et Le Prince mort.

Auteur du commentaire : Laure Chabanne

1. Comme l’a signalé C. Granger, Percement d’une route a été photographié dans le cadre du Salon de 1869 (F21 7640, album Michelez du Salon de 1869, fol. 16).
Index

Genre :
PaysageSylvestre
Scènes de genre
Peinture d’histoirePeinture militaire

Index des personnes représentées :
Paul Alexandre Protais (Paris, 1825 – Paris, 1890)

Index iconographique :
Cheval ; forêt ; foule ; homme ; soldat ; uniforme

Cette œuvre appartient à l’ensemble :
Les collections et commandes impériales

Copyrights

Étapes de publication :
2020-06-15, publication initiale de la notice rédigée par Laure Chabanne

Pour citer cet article :
Laure Chabanne, Percement d’une route, dans Catalogue des peintures du château de Compiègne, mis en ligne le 2020-06-15
https://www.compiegne-peintures.fr/notice/notice.php?id=650

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