Napoléon III à Chatou

Henry Pierre Léon Pharamond Blanchard (Lyon, 1805 – Paris, 1873)

Disciple de Gros, Pharamond Blanchard travailla sous la monarchie de Juillet pour les Orléans, suivant le prince de Joinville au Mexique et à Cuba. En 1847, il s’établit à Chatou où il résida jusqu’en 1861. Ce tableau signé « Chatou 1858 » est traditionnellement identifié comme la représentation de l’entrée triomphale de Napoléon III en 1858 dans cette ville. L’empereur vient de franchir un arc de triomphe érigé en son honneur. Il s’avance en tête du cortège, monté sur un cheval blanc, fêté par la foule qui se presse derrière la haie formée par les gardes nationaux. Debout sur une tribune, des officiels accompagnés de leurs épouses acclament le souverain en soulevant avec enthousiasme leurs chapeaux.
Si le sujet est facilement reconnaissable, la localisation et la datation de la scène font toutefois problème. Les délibérations du conseil municipal ne gardent pas trace d’une visite impériale en 1858. En revanche, Louis-Napoléon Bonaparte fut accueilli solennellement à Chatou le 5 octobre 1850, alors qu’il était prince-président. Peu de temps avant, en voyage officiel sur la route de Cherbourg, il avait traversé Chatou complètement désert, car la mairie avait mal compris les instructions données et envoyé la garde nationale à Rueil. Voulant réparer son erreur, le maire invita le président à faire une nouvelle visite à sa commune à l’occasion de la messe célébrée à Rueil en l’honneur de la reine Hortense. La ville fit dresser une estrade pour les autorités, ainsi qu’un arc de triomphe provisoire portant l’inscription « Vive le président » dessinée avec des fleurs¹Fermer1. Chatou, archives municipales, délibération du conseil municipal du 8 octobre 1850. Nous remercions Anne Galloyer, conservatrice du musée Fournaise, de nous avoir signalé et communiqué ce document.. Blanchard, fils d’un peintre décorateur de théâtre, fut peut-être associé aux préparatifs de la fête. Il pourrait avoir représenté a posteriori cet événement, bien que la présence d’aigles dorées (au sommet des mâts et sur les côtés de l’arc de triomphe) semble situer la scène après le 2 décembre 1851. Blanchard s’est-il trompé en travaillant d’après ses souvenirs ? S’agit-il de l’entrée de l’empereur dans une autre ville, la mention associée à la signature indiquant seulement le lieu où fut peint le tableau ? En tout cas, lorsque Napoléon III se rendit à nouveau en voyage officiel à Cherbourg puis en Bretagne avec l’impératrice Eugénie en 1858, il emprunta le chemin de fer de l’Ouest et ne passa pas par Chatou.

Auteur du commentaire : Laure Chabanne