Jacques Kuhnmunch, Laure Chabanne & Étienne Guibert
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Madame Paul Meurice
Auguste Joseph Bracquemond dit Félix Bracquemond (Paris, 1833 – Sèvres, 1914)

Illustration de comparaison
Auguste Vacquerie, « Portrait de Palmyre Meurice », Album des proscrits (photographies prises à Jersey et Guernesey pendant l’exil de Victor Hugo, rassemblées en 1855), Compiègne, musée national du château, INV. C.38.2162
Inscription

S.D.h.g. : BRACQUEMOND / 1866

Historique

Paul Meurice. Legs aux musées nationaux en 1906. Entré au musée du Luxembourg le 12 juillet 1906. Entré au musée du Louvre le 5 janvier 1929. Dépôt du département des Peintures du musée du Louvre en 1953. Entré au château de Compiègne le 19 juin 1953. Arrêté du 30 janvier 1957. Affecté au musée d’Orsay.

Commentaire

Élève du peintre Joseph Guichard (1806-1880), lui-même disciple d’Ingres et de Delacroix, Félix Bracquemond se fit remarquer au Salon de 1853 avec un autoportrait au pastel (Cambridge, Fogg Art Museum, Harvard University), où s’affirmaient son admiration pour Holbein et son intérêt pour les techniques de la gravure sur cuivre, qu’il avait apprises en autodidacte. Il poursuivit ses envois de tableaux au Salon jusqu’en 1869 et obtint une médaille en 1866 pour le portrait de madame Meurice. Acteur majeur du renouveau de l’estampe originale dès les années 1850, il abandonna ensuite la peinture pour se consacrer à la gravure. Il participa notamment aux expositions du groupe des peintres impressionnistes aux côtés de son ami Degas sans délaisser pour autant le Salon. Bracquemond joua aussi un rôle éminent dans la rénovation des arts décoratifs. Collaborateur du céramiste Théodore Deck à partir de 1857, il dessina et grava en 1866 pour le célèbre service dit « Rousseau » (du nom de son éditeur, Eugène Rousseau) des décors inspirés de la Manga d’Hokusai et considérés comme l’une des premières manifestations du japonisme dans l’art occidental. Après un bref passage à la manufacture de Sèvres en 1871, Bracquemond prit la tête de l’atelier fondé en 1872 à Auteuil par le porcelainier Charles Haviland pour frayer des voies nouvelles à la céramique11. Sur cet aspect de la carrière de Bracquemond, voir Félix Bracquemond et les arts décoratifs. Du japonisme à l’Art nouveau [cat. exp. Limoges, musée national Adrien Dubouché, 5 avril – 4 juillet 2005 ; Selb-Plössberg, Deutsches Porzellanmuseum, 25 juillet – 25 octobre 2005 ; Beauvais, musée départemental de l’Oise, 15 novembre 2005 – 14 février 2006], Paris, Réunion des musées nationaux, 2005..
Palmyre Meurice (1819-1874), fille du peintre Jean-Pierre Granger (1779-1840), épousa Paul Meurice en 1843. Ce dernier était l’ami d’Auguste Vacquerie et de Victor Hugo. Paul Meurice fut à l’origine de la création de la Maison de Victor Hugo à Paris. Cette institution conserve deux portraits dessinés de Palmyre Meurice : l’un daté de mai 1850 par Adèle Hugo, le second de 1843 par Ingres. Un troisième, non daté, est dans une collection privée. Bracquemond était lié avec Paul Meurice. Il fréquenta le salon tenu par son épouse et peignit en 1867 le portrait d’Auguste Vacquerie. Ce fut chez les Meurice qu’il rencontra Albert de Balleroy par l’entremise duquel il fut appointé « chef des peintres et des travaux d’art » à Sèvres. Il y retrouvait également le critique Champfleury et son ami Édouard Manet (dont l’épouse, brillante pianiste, jouait à quatre mains avec Palmyre Meurice), de même que Fantin-Latour22. Voir Adolphe Jullien, Fantin-Latour : sa vie et ses amitiés, lettres inédites et souvenirs personnels, Paris, L. Laveur, 1909, p. 99-102..
Ce portrait a frappé la critique par la hardiesse et la sincérité de la mise en page dominée par la robe noire rehaussée de ruchés rouges. L’influence ingresque y est sensible. Elle transparaît notamment dans la finesse de l’exécution, dans l’attention apportée au modelé des mains et dans le soin mis à décrire la toilette sans que celle-ci prenne le pas sur les traits et la psychologie du modèle. Edmond About ne manqua pas de relever cette filiation : « Je ne sais pas si M. Ingres a vu ce portrait de MmeP.M., mais s’il l’a vu, je doute qu’il ait pu rester froid devant ce début, si étonnant par la puissance et la science. » Alors que les couleurs éclatantes étaient à la mode dans les années 1860, l’harmonie des accessoires semble assourdie. La figure se découpe nettement sur un rideau olive (réminiscence du fond vert de certains portraits de la Renaissance, notamment chez Holbein33. Jean-Paul Bouillon, Bracquemond. Le réalisme absolu. Œuvre gravé, 1849-1859. Catalogue raisonné, Genève, éditions d’art Albert Skira, 1987, p. 10.), auquel la soie violette du confortable offre un discret contrepoint. Le choix du fond et la franchise du dessin évoquent le Portrait de madame Vinet par Hippolyte Flandrin (1840, Paris, musée du Louvre), image sans concession d’une femme d’âge mûr, alors considérée comme un sommet de l’art ingriste du portrait. Toutefois, entre 1840 et 1866 était intervenu un bouleversement : le portrait photographique était devenu monnaie courante. Bracquemond semble avoir voulu démontrer que l’acuité du regard du peintre pouvait aller bien au-delà de ce qu’autorisait la captation mécanique d’une image. J.- P. Bouillon a qualifié de « réalisme absolu » cet effort de transfiguration qu’il opérait « de la vérité du modelé ingriste en loi positive44. On retrouve ainsi un rideau vert et un vêtement alliant noir et rouge profond dans le Portrait de Thomas More par Holbein (1527, New York, The Frick Collection). ». La netteté et la précision du dessin sont celles de l’œil d’un graveur. Ce fut dans l’eau-forte que Bracquemond trouva le moyen qui lui convenait mieux pour rechercher ce réalisme absolu.

Auteur du commentaire : Laure Chabanne, Jacques Kuhnmunch

1. Sur cet aspect de la carrière de Bracquemond, voir Félix Bracquemond et les arts décoratifs. Du japonisme à l’Art nouveau [cat. exp. Limoges, musée national Adrien Dubouché, 5 avril – 4 juillet 2005 ; Selb-Plössberg, Deutsches Porzellanmuseum, 25 juillet – 25 octobre 2005 ; Beauvais, musée départemental de l’Oise, 15 novembre 2005 – 14 février 2006], Paris, Réunion des musées nationaux, 2005.
2. Voir Adolphe Jullien, Fantin-Latour : sa vie et ses amitiés, lettres inédites et souvenirs personnels, Paris, L. Laveur, 1909, p. 99-102.
3. Jean-Paul Bouillon, Bracquemond. Le réalisme absolu. Œuvre gravé, 1849-1859. Catalogue raisonné, Genève, éditions d’art Albert Skira, 1987, p. 10.
4. On retrouve ainsi un rideau vert et un vêtement alliant noir et rouge profond dans le Portrait de Thomas More par Holbein (1527, New York, The Frick Collection).
Bibliographie
Index

Genre :
Portraitmi-corps

Index des personnes représentées :
Palmyre Granger, madame Paul Meurice (1819-1874)

Index iconographique :
Drapé ; femme ; robe

Cette œuvre appartient à l’ensemble :
Les portraits des musées du Second Empire

Copyrights

Étapes de publication :
2020-06-15, publication initiale de la notice rédigée par Laure Chabanne, Jacques Kuhnmunch

Pour citer cet article :
Laure Chabanne, Jacques Kuhnmunch, Madame Paul Meurice, dans Catalogue des peintures du château de Compiègne, mis en ligne le 2020-06-15
https://www.compiegne-peintures.fr/notice/notice.php?id=342

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