Jacques Kuhnmunch, Laure Chabanne & Étienne Guibert
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Joueur de flûte (époque de Louis XV)
Ernest Meissonier (Lyon, 1815 – Paris, 1891)

Illustration de comparaison
L’Illustration, 18 mai 1861, p. 316
Inscription

S.D.b.g. : EMeissonier 1858 (E retourné et accolé au M) ; monogrammé sur le carton à dessins b.g. : EM (E retourné et accolé au M)

Historique

Bonnet (?). Ravenez (?) en 1866. Aimé Pastré en1884, en 1893. George Thomy-Thierry. Don au musée du Louvre en 1902. Dépôt du département des Peintures en 1953. Entré au château de Compiègne le 25 juin 1953. Arrêté du 30 janvier 1957.

Commentaire

Ayant commencé sa carrière comme illustrateur, Ernest Meissonier se fit une réputation au Salon comme peintre de genre. Les petits tableaux sur bois qu’il exposa à partir du début des années 1840 s’inspiraient des maîtres hollandais pour la composition et les effets de lumière, et de l’Ancien Régime quant aux sujets. Dédaignant la grâce frivole de la vie de boudoir qui séduisait alors Eugène Lami ou Camille Roqueplan, il s’attacha notamment à décrire des gentilshommes du xviiie siècle dans leurs occupations intimes. Meissonier travaillait toujours d’après nature et était soucieux du moindre détail. Il habillait ses modèles de costumes d’époque achetés à peu de frais au marché du Temple. Le raffinement de ses mises en scène et l’habileté extrême de son pinceau lui valurent un succès considérable. Ses tableaux s’arrachaient à prix d’or. Ils entrèrent dans les collections des plus riches amateurs, tels que Lord Hertford et son fils Richard Wallace, ou des grands banquiers et hommes d’affaires comme les Delessert, les Rothschild, les Péreire ou le Belge Alfred Mosselmann. En 1855, parmi toutes les peintures françaises présentées à l’Exposition universelle, ce fut une œuvre de Meissonier, La Rixe (Londres, Royal Collection trust), que Napoléon III acquit, pour la somme considérable de 25 000 francs, afin de l’offrir au prince Albert pour son anniversaire. À la fin de sa vie, cet artiste qui avait toujours voulu être peintre d’histoire renia pourtant ses « bonshommes », affirmant selon le témoignage d’Octave Gréard qu’ils « [n’étaient] pas l’expression de sa nature et qu’il [s’était résigné] à [les] faire en rêvant à autre chose, pour vivre ».
La scène a été peinte à Poissy, dans la propriété acquise par l’artiste en avril 1846. Meissonier y avait aménagé un atelier au deuxième étage, où il avait notamment fait installer des fenêtres à petits plombs et volets en hommage aux intérieurs hollandais. Cette pièce servit de décor à nombre de ses tableaux, l’ameublement étant modifié au gré des sujets. Ainsi, d’autres peintures, telles que le Portrait de MmeMeissonier et de sa fille11. Voir la notice de ce tableau par Constance Cain Hungerford dans Ernest Meissonier. Rétrospective [cat. exp. Lyon, musée des Beaux-Arts, 25 mars – 27 juin 1993], Lyon, musée des Beaux-Arts / Paris, Réunion des musées nationaux, 1993, no 65, p. 140, repr. p. 141. (1855, collection particulière) ou Le Graveur à l’eau-forte22. Voir la notice de ce tableau par Constance Cain Hungerford dans Ernest Meissonier. Rétrospective [cat. exp. Lyon, musée des Beaux-Arts, 25 mars – 27 juin 1993], Lyon, musée des Beaux-Arts / Paris, Réunion des musées nationaux, 1993, no 47, p. 125, repr. p. 124. (1862, collection particulière), montrent sous le même angle la haute fenêtre et la tapisserie sur le thème d’Apollon et les muses accrochée sur le mur de fond. Remarquons aussi que d’un tableau à l’autre, on retrouve les mêmes modèles et des accessoires identiques. Ainsi, ce musicien, vêtu du même habit couleur paille, avait joué en 1857 l’ami de La Confidence (voir R.F. 1854). La comparaison du Graveur à l’eau-forte et du Joueur de flûte montre toutefois combien Meissonier aimait à varier ses effets, notamment grâce au traitement de la lumière. Alors que les volets mi-clos tamisent le soleil entrant dans l’atelier du graveur, le flûtiste étudie sa partition la fenêtre ouverte. La clarté d’une belle journée inonde sa figure et son pupitre, laissant dans l’ombre le désordre qui l’entoure. Concentré, il s’applique à jouer juste, battant la mesure du pied droit. L’espace du tableau s’ordonne autour de lui, bien que les lames du parquet filent vers la droite de l’image. Cet étrange effet de perspective, assez courant chez Meissonier, semble rapprocher le spectateur du musicien.
Ce tableau a été identifié avec celui présenté au Salon de 1861 (no 2186) sous l’intitulé Un musicien, œuvre dont Théophile Gautier estima qu’elle démontrait « qu’un vrai peintre n’a pas besoin d’un sujet tenant dix lignes d’explication au livret pour intéresser33. Théophile Gautier, Abécédaire du Salon de 1861, Paris, E. Dentu, 1861, p. 280. ». Toutefois, si l’on en croit la gravure qu’en publia L’Illustration44. A. M., « Salon de 1861. Reproduction d’œuvres exposées », L’Illustration, 15 juin 1861, p. 315-317, repr. p. 316 et commenté p. 315-316., il ne peut s’agir de notre composition : le personnage et son attitude sont très similaires, mais de nombreux détails diffèrent (habit, pupitre, éléments du décor). Le commentaire qui accompagnait l’image permet de le confirmer : « Il est inutile de dire que le costume, l’ameublement, les fauteuils en velours vert d’Utrecht, les profils des chambranles, tout cela appartient au dix-huitième siècle. » La collection des frères Péreire comportait un Joueur de flûte d’époque Louis XVI dans un salon à boiseries qui semble mieux correspondre à celui exposé en 1861. C’est probablement à propos de ce tableau que Philippe Burty écrivit en 1866, le comparant au nôtre, que le flûtiste était « vêtu de noir et absolument différent de [celui de 1858] par le tempérament et les habitudes ».

Auteur du commentaire : Laure Chabanne

1. Voir la notice de ce tableau par Constance Cain Hungerford dans Ernest Meissonier. Rétrospective [cat. exp. Lyon, musée des Beaux-Arts, 25 mars – 27 juin 1993], Lyon, musée des Beaux-Arts / Paris, Réunion des musées nationaux, 1993, no 65, p. 140, repr. p. 141.
2. Voir la notice de ce tableau par Constance Cain Hungerford dans Ernest Meissonier. Rétrospective [cat. exp. Lyon, musée des Beaux-Arts, 25 mars – 27 juin 1993], Lyon, musée des Beaux-Arts / Paris, Réunion des musées nationaux, 1993, no 47, p. 125, repr. p. 124.
3. Théophile Gautier, Abécédaire du Salon de 1861, Paris, E. Dentu, 1861, p. 280.
4. A. M., « Salon de 1861. Reproduction d’œuvres exposées », L’Illustration, 15 juin 1861, p. 315-317, repr. p. 316 et commenté p. 315-316.
Bibliographie
Index

Genre :
Scènes de genre
Peinture d’intérieur

Index iconographique :
Flûte ; homme ; musicien

Œuvre en rapport dans la collection
Copyrights

Étapes de publication :
2020-06-15, publication initiale de la notice rédigée par Laure Chabanne

Pour citer cet article :
Laure Chabanne, Joueur de flûte (époque de Louis XV), dans Catalogue des peintures du château de Compiègne, mis en ligne le 2020-06-15
https://www.compiegne-peintures.fr/notice/notice.php?id=532

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